Cas 2: Balthazar

1ère séance :

  • J’entame le premier cycle du premier degré de la RDC.
    Le mode d’entrée en relation avec son corps que je lui propose, sera « actif ».
  • Comme je le trouve inhibé dans la relation avec les autres, ainsi que dans la relation avec son corps, je lui propose une mise en relation corporelle dans la mobilité, le déplacement.
  • «  Ça bouge, ça vit. »
  • Je lui propose de saluer les différentes parties de son corps dans l’action. On « découpera » le corps en 4 parties essentielles : les jambes, les bras, la tête, le dos.
  • Après avoir salué tous ces éléments du corps, comme un gigantesque puzzle, comme un vitrail, on se déposera délicatement sur le sol, et on ne fera « rien » si ce n’est qu’écouter, rêver, imaginer, sans bouger, juste dans le souffle de la respiration.
  • « La première séance, je te propose une musique, si elle te plaît, on pourra l’écouter à nouveau la prochaine fois, ou pas. »
  • Les chaussures sont laissées à l’entée de la salle de sophrologie, à la fois pour prendre conscience qu’on entre dans un endroit différent, et pour signaler à mes autres collègues orthophonistes du cabinet que la pièce est utilisée, langage non-verbal pour signifier

« NE PAS DERANGER »

  • En fermant les rideaux je rends l’endroit plus intime, pas de regard possible de l’extérieur, voyant un jeune adolescent et une adulte se dégingander comme des pantins désarticulés ?…
  • Pas de jugement extérieur.
  • De plus, je « fais avec ».
  • Les mouvements proposés sont réalisés à deux, le patient et moi-même. Autant pour des facilités de compréhension de la consigne, que pour créer une relation de confiance, et un « abandon » possible.
  • Pour cela, dès que je le peux, après des contrôles visuels réguliers, je ferme les yeux, permettant à l’autre plus de liberté dans ses mouvements ou non. Certains s’offrent le luxe d’en faire moins, ou de ne pas en faire du tout.
  • Quelle que soit leur réponse ou non, elle porte sens pour eux.
  • On est debout, en chaussettes, pour saluer les pieds.
    « Si tu veux bien, on va frotter la plante du pied gauche, dans tous les sens, à droite, à gauche, vers l’avant, vers l’arrière, en rond vers la droite, puis vers la gauche, le talon, les bords externes droits, à gauche…et, lorsqu’il sera chaud, suffisamment chaud, alors, on arrête et on écoute ce pied gauche, peut-être on le compare au droit…on écoute, on ne cherche rien, juste accueillir les sensations, et les mettre dans la mémoire, la mémoire de ton corps. Comme une grande armoire, un grenier, une grande valise, une malle en osier…
  • Alors, imagine les trois points de contact de ton pied gauche au sol :
    Le gros orteil, le petit orteil et le talon,
    Imagine que ces trois points sont colorés, reliés par une ficelle, un ruban, un lien….
    Imagine que ton pied gauche devienne super puissant, fort vigoureux, comme la base d’une colonne, prêt à supporter un poids important.
    Alors, doucement les contacts de ton pied droit décollent du sol, le talon, le gros orteil, le petit orteil, te voilà en équilibre sur ta jambe gauche.
  • Soit tu tiens ton pied droit, soit tu le laisses, et tu sautes sur ta jambe gauche, en avant, en arrière, de côté, et tu te promènes dans la pièce, si tu tombes, tu as perdu…
  • Quand tu l’as fait suffisamment, tu t’arrêtes, et déposes ta jambe gauche sur le sol, et là tu écoutes ta jambe gauche, ton pied gauche, peut-être c’est lourd, peut-être pas, tu mets en mémoire les impressions, les perceptions. Dans la mémoire de ton corps.
  • C’est le moment de frotter au sol la plante de ton pied droit, dans tous les sens….lorsqu’il sera chaud, suffisamment chaud, alors, on arrête et on écoute ce pied droit, peut-être on le compare au gauche. Tu écoutes les ressentis, sans rien chercher, tu les ajoutes dans la mémoire de ton corps. C’est alors que ce pied droit te semble puissant, solide, capable de porter un poids important.
  • Comme en réponse, les contacts de ton pied gauche deviennent plus légers, et décollent du sol : le talon gauche, le gros orteil gauche et le petit orteil gauche. Te voilà en équilibre sur ton pied droit, le pied gauche n’a plus de contact avec le sol et tu sautes sur ta jambe droite, tu investis la pièce, dans tous les sens.
  • Quand tu l’as fait assez, tu t’arrêtes, ton pied gauche se pose à nouveau sur le sol, une fois de plus, tu écoutes les sensations de ton pied droit. Tu accueilles, tu enregistres, tu inscris les informations que t’envoient tes sens, dans la mémoire de ton corps.
    Voilà, nous venons de dire bonjour aux pieds et aux jambes.
  • C’est le moment de nous occuper des bras.
    Pour bien les relâcher, je te propose de remonter tes épaules le plus près de tes oreilles. Tu les montes sur l’inspiration et quand ça devient désagréable, tu les laisses retomber d’un seul coup, sur le souffle.
    A gauche, à droite, puis les deux ensembles.
  • Alors, imagines que dans la paume de ta main gauche, tu déposes quelque chose de désagréable, un soucis, un tracas; lorsque tu l’as mis en place, tu l’enfermes en pliants tes doigts dessus : d’abord l’auriculaire, puis l’annulaire, le majeur, l’index, c’est le pouce qui verrouille cette cage, cette prison. Alors, tu inspires et tu moulines ton bras gauche, d’avant en arrière, ça tourne, comme les ailes d’un moulin, les hélices d’un avion. Lorsque tu l’as fait assez, avec le souffle, tu ouvres la « cage main » et tu laisses partir loin de toi ce que tu as enfermé.
  • Tu laisses ton bras revenir tranquillement le long de ton buste, et tu écoutes ton bras gauche et ta main gauche. Peut-être c’est lourd, c’est léger, tu inscris dans la mémoire de ton corps ce que tu ressens.
    C’est le tour du bras droit. Dans ta main droite, tu déposes une crainte, une contrariété. Tu l’enfermes avec les doigts de ta main droite : l’auriculaire droit, l’annulaire, le majeur, l’index et c’est le pouce droit qui cadenasse le tout. Tu inspires et tu laisses ton bras droit tourner, dérouler, d’avant en arrière, jusqu’à qu’il soit chargé suffisamment. Alors, tu arrêtes, tu écoutes ton bras droit, ce qu’il te « raconte », et tu l’enregistres dans la mémoire de ton corps.
  • Lorsque tu as assez écouté tes deux bras, les voilà qui partent tous les deux :
    Tu refermes les deux paumes de tes mains avec tes doigts, tu verrouilles avec tes pouces, et ainsi, tu laisseras tes bras s’élancer, mouliner, d’avant en arrière, le temps nécessaire. Tranquillement, ils s’arrêteront, pour se poser le long de ton buste. Tu  restes attentif à tes deux bras, aux sensations, tu apprécies, tu t’appropries le ressenti, tu le mets en mémoire celle de ton corps.
  • Voilà, on vient  dire bonjour aux bras.
  • C’est la moment de saluer la tête.
    On la situe, entre les deux épaules, portée par le cou, comme une fleur au bout d’une tige, la tige, c’est la colonne vertébrale. Le bout de la tige qui touche la « fleur-tête », ce sont les vertèbres cervicales.
    Comme cette fleur est fragile et délicate, on va la stimuler dans la douceur et la lenteur. C’est le menton qui va se diriger vers la poitrine, sur le souffle, sur l’expiration. LEN…TE…MENT. Sur l’inspiration, le menton va s’éloigner de la poitrine, la tête va retrouver sa position « neutre », droite, stable. Tu réalises ce mouvement plusieurs fois.
  • Alors tu arrêtes, tu écoutes ta tête, particulièrement l’arrière. Bouger la tête ainsi, c’est comme si on dit « OUI ». C’est important  dans la vie, parfois,  de savoir dire « oui ».
  • Chacun son tour, on va dire à voix haute, ou pas, à quoi on a envie de dire oui.
    -Moi, j’ai envie de dire oui à la vie. »
    -«…….»
    -« J’ai envie de dire oui au soleil. »
    -«…….»
    -« Je dis oui aux vacances. »
    Respect de son silence, mes exemples peuvent lui montrer une voie, un mode d’expression possible, orienté vers l’extérieur.
  • Pour le second mouvement que je te propose, toujours dans la lenteur, c’est la tête qui va se tourner vers l’épaule gauche, avec le souffle, l’expiration.
  • Sur l’inspiration, la tête revient à la position initiale, en centre, prochaine expiration, la tête se dirige vers l’épaule droite, et revient sur l’inspiration. Tu répètes ce mouvement au moins trois fois. Puis, lorsque tu arrêtes, écoutes ta tête, mets en mémoire ce que tu ressens…
  • Ce mouvement, c’est comme dire « NON ». Savoir dire non, parfois dans la vie, c’est important.
  • Chacun son tour, on va dire à voix haute, ou pas, à quoi on a envie de dire non.
    -« Moi, je dis non à la guerre.»
    -«…….»
    -« Moi je dis non au froid. »
    -«…….»
    -« Je dis non à l’injustice. »
    -«…….»
    Voilà, on a pris le temps de dire bonjour à la tête.
  • C’est le tour du dos, nous allons lui dire bonjour, souvent il est oublié, parce que dans la glace, on a du mal à le voir, on voit plus celui des autres que le nôtre. On peut appeler ce côté la face lunaire, comme la lune, lorsqu’on la voit, c’est la nuit, moment de la journée où l’on se promène peu, pour l’admirer, il faut le vouloir, c’est un choix.
    Pour saluer ce dos, je te propose un auto-massage, celui du cheval à bascule.
  • On va s’asseoir sur un tapis de sol, tu vas accrocher tes mains aux genoux et te laisser rouler en arrière, puis revenir en avant. Attention, la règle du jeu interdit de poser les pieds au sol, lorsque tu roules « cucul en l’air, cucul en bas», le retour se fait sur les ischions, sans autre contact au sol. C’est un massage de ton dos, des vertèbres cervicales aux vertèbres lombaires.
  • Tu le fais tant que c’est agréable pour toi, au moins trois fois, à ton rythme, à ta cadence…lorsque ce sera suffisant pour toi, tu arrêteras le mouvement, et avec délicatesse, tu déposeras ton corps sur le tapis, et là, tu écouteras ton dos, ce que tu perçois, tu l’accueilles, pour le mettre dans la mémoire de ton corps.
  • Ton corps est posé, déposé, tranquille sur le sol, et tu vas te balader à travers les contacts qu’il a avec le sol.
    Imagines que tu places ta conscience dans tes deux talons, tu remontes vers les mollets, tu glisses vers les cuisses, tu te prolonges en direction de ton fessier, et te voilà dans ton ventre. Imagines cette première partie de ton corps, comme le rez-de-chaussée de ta maison-corps, c’est la base, c’est solide, c’est puissant, ça porte le reste de l’édifice…si tu veux bien, accueille la prochaine inspiration et laisse partir un souffle long, chargé de soucis, de tracas, laisse-les partir avec le souffle.
  • Replace ta conscience dans la partie basse de ta colonne vertébrale, ça prend naissance, ça débute au milieu de ton fessier, comme une petite queue. La colonne c’est comme la tige d’une fleur, un chemin, une piste cyclable, un rail de chemin de fer, un escalier, un échelle….commences ta promenade, du bas vers le haut, en toute tranquillité, comme pour passer du rez-de-chaussée, au premier étage de ton « corps-maison ».
  • Tu passeras les vertèbres lombaires, puis les vertèbres dorsales, jusqu’aux vertèbres cervicales. Arrivé là, tu reculeras un peu en arrière, pour emprunter deux couloirs qui vont te conduire vers un rond-point, les omoplates, là, tu prendras le temps de t’assurer que ces omoplates sont correctement déposées sur le sol, puis, tu continues ta promenade, le couloir tourne, tu tournes aussi, ce sont les épaules, tu te laisses glisser vers les coudes, là aussi ça tourne, légèrement, jusqu’aux poignets, ça se rétréci un peu, tu termines ta course dans les mains, la paumes, le dos, les doigts, jusqu’au bout des ongles.
  • C’est la seconde partie de ton corps, comme un pont entre le bas et le haut, la terre, la réalité, et le ciel, l’imagination….
  • Accueille la prochaine inspiration et laisse partir un souffle long, chargé peut-être de déceptions, d’ennuis, laisse tout partir avec le souffle.
  • Replace ta conscience, si tu veux bien, au sommet de ton crâne. Là, tu vas laisser glisser la détente sur tes cheveux, peut-être ça caresse, comme un vent chaud, ça mouille-chatouille comme de la bruine, ça se répand jusqu’au front. Là, tu laisses venir un chiffon, des essuie-glaces, pour rendre ton front tout lisse, glissant comme une patinoire, comme un miroir….les soucis qui veulent s’y accrocher, ils glissent. Tu continues le chemin de la détente vers les tempes, les oreilles, ça glisse jusqu’à la mandibule, vers le menton, de là, ça remonte vers les lèvres, lèvre inférieure, où tu prends le temps de déposer un baume à lèvres de calme, sur toute la longueur, l’épaisseur de ta lèvre inférieure. Tu feras pareil pour la lèvre supérieure. Le chemin de ta détente continue, vers les ailes du nez, les joues, les pommettes, le contour des yeux. Toute ta figure est déposée, calme tranquille.
    C’est la troisième et dernière partie de ton corps, le grenier, le dernier étage de ta « maison-corps », en contact avec le ciel, à l’infini.
  • Voilà le moment d’accueillir la prochaine inspiration et de laisser partir un souffle long, chargé de choses inutiles. Alors, tu avales ta salive, tu décolles ta langue du palais, ce simple geste relâche 17 muscles d’un coup !
  • Ton corps est calme, posé sur le sol, relâché, tranquille, serin.
  • Alors imagines un chouette endroit où tu aimerais te retrouver, avec des gens que tu aimes, ou seul. Prend le temps de dessiner le ciel, le soleil, la caresse du vent, la chaleur, ou pas, les arbres, les fleurs, les odeurs, les bruits de la nature…
  • Quand tu t’y seras assez promené, tu pourras revenir ici et maintenant, dans cette pièce, sur le sol, pour cela tu vas respirer profondément, bouger tes articulations, tes chevilles, tes poignets…avant d’ouvrir tes yeux, je te propose de prendre conscience de ce que tu viens de réaliser ici et maintenant, tu connais le chemin, tu pourras y retourner toi-même, tout seul, en pleine conscience.
  • Quand tu le voudras, tu pourras ouvrir les yeux….
  •               -« Comment vas-tu ? »
    Nous allons maintenant passer dans mon bureau et tu dessineras ce que tu as envie…

DESSIN 1 :

balthzar01
  • « C’est mon chien et moi, en Italie, on joue au freezbee sur la plage. C’était un moment super bien ! »
  • On remarquera la « plénitude » du dessin, aucun blanc n’est laissé, tout est rempli, coloré. Balthazar placé à la droite du chien, semble l’empêcher de s’éloigner, lui barre la possibilité de sortie.
  • Son schéma corporel, sur le dessin semble flou au niveau des « épaules-coudes », particulièrement à droite, quant à sa bouche  elle est visiblement décalée, par rapport aux yeux et au nez. Sans cheveux, sans pied, ses mains sont des moignons roses.
  • Les couleurs différencient Balthazar de son chien.
  • La trace graphique est impulsive, visible.